Article du journal « Libération » sur le tourisme responsable

Jusqu'à ce jour, voici le seul article intéressant paru dans un grand quotidien national à propos des thématiques qui nous concernent...

Merci pour ce véritable travail de journaliste !

Nous avons donc décidé de le ressortir des nimbes où il se trouvait !

Retrouvez-le 11 ans plus tard...

Article dans Libération du 7 août 2008, sur le tourisme vert et le tourisme responsable:

 Article de LAURE NOUALHAT et GUILLAUM LAUHAY

 

L’écotourisme, ça a commencé au début du XXe siècle avec les grands parcs nationaux américains. Depuis, la vague du développement durable est passée par là, et le verdissement contamine jusqu’à nos valises. Transporteurs et voyagistes rivalisent désormais d’étiquettes «durable», «nature» et «solidaire». Car ces notions entrent de plus en plus dans les critères de choix de touristes de plus en plus nombreux - il y a eu près de 900 millions de voyages dans le monde l’an dernier.

DE QUOI PARLE-T-ON ? 

Si le mot est à la mode, les Français n’ont encore qu’une vague idée de ce qu’est le tourisme responsable ou durable, écolo, solidaire ou éthique. L’éco-lodge en pays tropical, l’île écolo, l’écovolontariat en village africain, le trek andin… l’ensemble de ces voyages pourrait entrer dans la case durable… tout autant que le gîte ardéchois, la randonnée bretonne à vélo et le camping à la ferme.

D’après un sondage TNS-Sofres réalisé en avril, 61 % des personnes interrogées ont le sentiment d’être mal informées à propos du tourisme responsable.

Et ce n’est pas la tripotée de concepts et de définitions qui leur permettra d’y voir plus clair. «Il existe une confusion perpétuelle, personne n’est persuadé d’avoir compris tout le monde», confie Rachid Amirou, sociologue du tourisme qui se méfie des discours culpabilisateurs vis-à-vis des vacanciers. 

D’ailleurs, tout le monde ne jette pas la pierre au tourisme de masse. Certains développements ont été plus heureux que d’autres.

«Quand Cuba développe son tourisme, l’île préfère concentrer l’afflux de touristes en un seul endroit pour ne pas défigurer d’autres parties de l’île, explique un spécialiste.

Dans d’autres régions, comme au Mali, la misère étant partout, autant répartir la manne touristique entre plusieurs villages,plusieurs familles.»

Et l’opposition ne se résume pas à voyage en groupe organisé contre voyage individuel. 

Bref, définir des critères simples de tourisme durable est loin d’être évident, selon qu’on est plus sensible au réchauffement, à la biodiversité, au respect des populations ou à l’économie locale.

Françoise El Alaoui, consultante spécialisée en tourisme durable et équitable, auteure d’une thèse sur le sujet dès 1998 (1) tente une définition : «Quelle que soit son appellation, le tourisme que l’on qualifie d’équitable au sens large doit être respectueux de l’environnement et des populations locales, tout en assurant une rentabilité économique au tour-opérateur.»

 

QUI VOYAGE DURABLE ? 

Pour rester sur le cas français, 72 % des voyageurs se disent prêts à partir dans ce cadre-là. Mais le marché est mal connu : «Le secrétariat d’État chargé du Tourisme ne collecte aucune donnée, pointe Françoise El Alaoui. 

Tout ce que l’on sait provient du sondage TNS-Sofres d’avril 2008, dans lequel 7 % des gens affirment avoir participé à un voyage responsable, contre 2 % en 2007. Mais qu’est-ce qu’un voyage responsable dans l’esprit des gens ?

Il n’existe aucun label, mais beaucoup de brouhaha et peu de concret.»

Deux associations de professionnels proposent une offre constituée : Agir pour un tourisme responsable (ATR) a rassemblé 150 000 voyageurs ces dernières années et l’Association pour un tourisme équitable et solidaire (Ates), environ 6 000.

Au regard des 79 millions de touristes que l’Hexagone accueille chaque année et des quelque 30 millions de nos compatriotes qui partent en vacances (dont environ 8 millions à l’étranger), ce tourisme alternatif ferait plutôt office de nain.

 

EST-CE RÉSERVÉ A UNE ÉLITE ? 

Dès qu’on aborde les questions écolo, l’argument du coût revient comme un épouvantail.

Car le prix à payer peut être jusqu’à 30 % plus cher.

«Le tourisme responsable est plus cher que le tourisme classique, surtout s’il met en œuvre des savoir-faire importants, analyse Jean-Pierre Lamic, accompagnateur en montagne et président de l’Association des voyageurs et voyagistes éco-responsables, auteur d’un livre sur le sujet (2).

Au Kenya, ça coûte plus cher de faire un campement, qui impacte moins sur l’environnement, que de loger dans un lodge : le campement inclut un garde, le guide, le cuisinier…»Mais équitable ne veut pas forcément dire hors de prix ou au bout du monde : «Le touriste peut aussi se prendre en main : louer un gîte en Ardèche et y aller en train, c’est émettre très peu de CO2, respecter les populations locales et s’assurer que l’argent sera directement injecté dans l’économie du pays ! souligne Françoise El Alaoui.

Le tourisme équitable, responsable ou solidaire n’est pas forcément un voyage exotique et lointain.»

 

QUEL EST L’AVENIR ? 

«L’engouement des consommateurs est certain mais bien souvent, devant la réalité du marché, la faiblesse de l’offre et les prix ultra compétitifs pratiqués par les voyagistes normaux, il est difficile de passer à l’acte et d’acheter un voyage étiqueté solidaire, durable ou équitable», précise Françoise El Alaoui.

La question du label est centrale pour le développement de ce tourisme.

Car, aujourd’hui, tout le monde peut prétendre faire de l’écotourisme, avec pour seul critère que l’activité se déroule dans la nature.

A l’inverse, certaines petites structures, en France comme à l’étranger, défendent des bonnes pratiques depuis des années sans avoir les moyens de s’en vanter.

Des associations ont choisi de rédiger leur propre charte, certaines, comme ATR, faisant valider le respect de leurs critères par un organisme indépendant. Enfin, l’écolabel européen peut s’appliquer à un lieu d’hébergement touristique en certifiant qu’il «utilise l’énergie efficacement et respecte l’environnement naturel».

 

Mais la «petite fleur» symbolisant ce label manque cruellement de notoriété. 

En attendant une offre clairement étiquetée, la flambée pétrolière a déjà fait progresser la cause cet été : en France, la SNCF voit son trafic augmenter, alors que celui des autoroutes a baissé de 4 % en juillet. 

 

(1) http://elalaoui.free.fr 

(2) Tourisme durable : utopie ou réalité, L’Harmattan, http://blog.voyages-eco-responsables.org

Écrire commentaire

Commentaires: 0
Loading

©Copyrignt photos :

Jean-Pierre Lamic, Corinne Bazin, Véronique Teisseire, Katamkera, Terres Nomades

 

Réalisation images :

 

- Julie AMBRE

- Tiphaine MUFFAT

- Manon MATHIEU

- Titouan FAURE

Étudiants en DUT Gestion Administrative et Commerciale des Organisations (GACO)

Université Savoie Mont Blanc